dimanche 29 mai 2011

Dans l'allée... Émile Nelligan

 Dans l’allée 

Toi-même, éblouissant comme un soleil ancien 
Les Regrets des solitudes roses, 
Contemple le dégât du Parc magicien 
Où s’effeuillent, au pas du Soir musicien, 
Des morts de camélias, de roses. 

Revisitons le Faune à la flûte fragile 
Près des bassins au vaste soupir, 
Et le banc où, le soir, comme un jeune Virgile, 
Je venais célébrant sur mon théorbe agile 
Ta prunelle au reflet de saphir. 

La Nuit embrasse en paix morte les boulingrins, 
Tissant nos douleurs aux ombres brunes, 
Tissant tous nos ennuis, tissant tous nos chagrins, 
Mon cœur, si peu quiet qu’on dirait que tu crains 
Des fantômes d’anciennes lunes ! 


Émile Nelligan

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