Qui est Émile Nelligan?

Né à Montréal, d'un postier Irlandais et d'une pianiste canadienne-français, Émile Nelligan opta très tôt pour la culture et la langue de sa mère, jusqu'à vouloir qu'on prononce son nom à la française.  Un peu à la façon de Rimbaud ou de Lautréamont, Nelligan est un éclair, une éclaircie dans le ciel pâle et épais du XIXième siècle.  Il a assimilé l'essentiel de l'art de son temps : Beaudelaire et le Parnasse, Verlaine et les décadents, Rollinat et Rodenbach.  Malgré les séances publiques de l'École littéraire de Montréal, où il triompha, malgré l'amitié d'un de Bussières ou d'un Dantin - qui préfacera magnifiquement son recueil- le jeune collégien en rupture de ban, entièrement donné au "Rêve", à "L'Idéal", à l'or pur de la poésie, ne put franchir normalement le seuil des "20 ans".  Il passa le reste de sa vie interné dans des institutions psychiatriques, à peine capable de réciter par coeur des lambeaux de son oeuvre passée.

Le nom, le destin, le visage d'Émile Nelligan sont les plus connus de toute la littérature québécoise.  On a fait de cet adolescent exceptionnel un mythe : celui de l'inspiration géniale, des amours enfantines, de la révolte, des musiques funèbres, de la prémonition... Tout le monde s'est penché sur son berceau-cercueil, des archivistes aux fraternel, dans le Nez qui voque de Réjean Ducharme.  Mais Nelligan est avant tout un écrivain, pour qui le poème est un texte a travailler plutôt qu'un prétexte à célébrations, à regrets, à plaintes.  Il n'a laissé aucune lettre, aucun journal : ses poésies sont dans tous les sens du terme une oeuvre complète.

source : La poésie québécoise (anthologie) de Laurent Mailhot et de Pierre Nepveu.


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