mercredi 1 juin 2011

Le saxe de famille Émile Nelligan

Le saxe de famille
Émile Nelligan

Donc, ta voix de bronze est éteinte :
Te voilà muet à jamais !
L’heure plus ne vibre ou ne tinte
Dans la grand’salle que j’aimais,

Où je venais, après l’étude,
Fumer le soir, rythmant des vers,
Où l’abri du monde pervers
Éternisait ma solitude.

Sur le buffet aux tons noircis
De chêne très ancien, ton ombre
Lamente-t-elle, Saxe sombre,
Toute une époque de soucis ?

Serait-ce qu’un chagrin qui tue
T’a harcelé comme un remords,
Ô grande horloge qui t’es tue
Depuis que les parents sont morts ?

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