Rimes automnales
Adieu, les frais zéphyrs, les aubes ravissantes
Qui font pâlir l'azur et sourire les eaux!
Adieu, source limpide aux ondes jaillissantes
Et doux pleurs du matin perlant sur les roseaux!
Hélas! les jours sereins que l'aurore charmante
Enfante au bas des cieux derrière l'horizon
Font place aux vastes pleurs que roule la tourmente,
A la mauvaise humeur de la triste saison.
Bientôt l'oiseau frileux quittera nos rivages
En voyant sous l'autan les bois se dégarnir,
Les brumes s'entasser sur les rochers sauvages
Et l'homme méditer et le ciel se ternir.
Déjà l'automne plane au fond des cieux moroses,
Où le soleil est pâle ainsi qu'un oeil mourant,
Et le souffle hiémal qui disperse les roses
Fait sangloter la feuille au front du bois pleurant.
Une immense tristesse assombrit la nature,
Qui gémit sur la terre et râle dans les flots;
À l'horrible aquilon, qui gronde et les torture,
Le roc jette un soupir et l'onde des sanglots.
Sous les cruels frimas le flanc des monts frissonne,
Le fleuve va frémir dans les immensités;
Tout se lamente et souffre, et le vent ne moissonne
Que pleurs dans les déserts et cris dans les cités.
Plus d'un regard s'attriste au fond des lointains vagues;
L'oiseau dans les brouillards sème un lugubre accent;
Un funèbre accord naît sous l'écume des vagues;
Nul rayon ne reluit dans le ciel pâlissant.
Durant ces jours de deuil, qui meurent dans l'orage,
L'homme devient plus grave et se plaît à songer;
Il va souvent, pensif, rêver sous quelque ombrage,
Écouter l'aquilon qui vient tout ravager.
La nature l'émeut par sa douleur immense:
Il ne peut s'empêcher de pleurer, de frémir,
Car son coeur est sensible et quand elle commence
A souffrir sous la bise il commence à gémir.
C'est bon qu'il pleure ainsi sous l'aquilon qui tonne,
Qu'il pense à son passé, qu'il songe à l'avenir,
Que pour les morts il prie et que le sombre automne
Lui dise qu'il verra bientôt la mort venir.
Albert Ferland 1872-1943
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